→ Présentation du bookscanner sur radio campus (à 40min)
Dans le jardin des communs, il y avait une cabane. Cachée par les feuilles, son ossature métallique était vêtue d'un grand chapeau noir. Ce n'était pas vraiment une cabane en réalité, puisqu'il n'y avait ni mur, ni fenêtre, ni porte. On ne pouvait pas s'y abriter mais on s'y retrouvait, on y rassemblait des bouquets de papiers numérisés puis imprimés. On y préparait des boutures de livres à offrir. Les voisins et les voisines s'y rendaient régulièrement pour arroser les mots qu'iels avaient semé. Dans cette cabane, on observait pousser des images et des textes. Les livres ne pouvaient pas fâner. Je ne comprenais pas pourquoi il fallait tant s'en occuper puisqu'ils ne pourrisaient pas. Mais on me répondit que l'oubli les faisaient mourir et que leurs graines dépendaient des lecteur·ices pour se propager. On me racontait qu'il fallait préserver la bibliodiversité.
Durant un stage auprès du collectif Luuse, j'ai eu la chance de participer au lancement au projet auto-initié nommé "Archivism", qui questionne les formes d'archives en invitant à penser la pratique des designers dans la "sauvegarde des connaissances, qu’il s’agisse de veiller à les archiver, ou de réfléchir à la manière dont elles peuvent se déployer".
Le bookscanner, construit dans le cadre d'une résidence au fab-lab de l'iMAL à Molenbeek, s'inscrit dans dans la préservation et la diffusion des savoirs écrits. Fabriqué empiriquement à partir de bribes de plans trouvés sur Internet, sa documentation est à son tour rendue accessible. Ce numérisateur de livres fonctionne à l'aide d'un micro ordinateur, un raspberry-pi relié à un programme appelé Pi-Scan qui active les appareils photos du bookscanner et enregistre les prises de vue en une suite de fichiers. Le projet s'inspire modèle de Daniel Reetz et du bookscanner de l'École de Recherche Graphique, initié par entretenu par le collectif du Rideau de perles. Le Forum DIY Bookscanner qui recense et archive les expérimentations de la communauté a été d'une aide utile lors de la fabrication de l'objet.
Le bookscanner fonctionne grâce à la participation d'un réseau d'acteur·ices rassemblés autour de la numérisation des ressources. Mis en marche par une action collective, il peut constituer le point de départ d'évènements, de lectures collectives ou d'arpentages. Une fois numérisés, les documents peuvent-être téléversés sur l'interface de la documenthèque, une bibliothèque numérique codée dans la poursuite du projet permettant aux participant·es de repartir avec les ressources hébergées puis téléchargées sur leur propre matériel.
Cette expérience a fait émerger la question de la préservation et de l’archivage des documents présents dans le lieu témoignant des dynamiques collectives qui s’y déroulent. Si « toute expérience collective est composée de savoirs qu’elle produit tout au long de son expérimentation » (Roux, 2018 : 80), les savoirs désignent des habilités acquises par l’expérience elle-même. Autrement dit, ces « contre-espaces » temporaires et souvent illégaux ont besoin de dispositifs et de moyens de préservation des savoirs qui s’y apprennent afin d’éviter leur disparition. Ainsi l’existence des luttes qui se manifestent par l’expérimentation dépend de leur transmission.
La station des savoirs est un projet de la coopérative Praticable avec la ferme paysanne de la Martinière. La station vise à documenter localement les savoirs et pratiques de la ferme tout en archivant les contenus du web. Pensée comme un mobilier low-tech dans le cadre d'une ferme "espace ouvert de transformation et d'expérimentation autour de l'autonomie alimentaire" elle vise à pratiquer le numérique autrement, en opposition aux exploitations agricoles de plus en plus technologiques.
Ce projet, dont le nom inspire le titre de ce projet de recherche m'intéresse en ce qu'il convoque nombreuses questions :
Tentative de compréhension de mon processus de création tel qu'il est à ce jour :
Je veux une présidente est un journal recensant les commentaires sexistes et homophobes des politicien·nes en France depuis 1998 en les confrontant au poème I want a president de Zoe Leonard écrit la même année. Le journal constitue une archive de l'état des lieux social, juridique et politique du pouvoir dominant masculin dans la société française durant les deux dernières décennies. Exposé dans un contexte institutionnel accompagné d'une sélection d'ouvrages féministes, les élu·es activent le journal en slamant le poème et en engageant une conférence autour du sexisme structurel en politique.